Counters - Documentaire (2018)
Documentaire de E Il-Ha 1 h 39 min 3 novembre 2018
Au Japon, des mouvements ultra-nationalistes et xénophobes propagent des discours de haine envers les japonais d’origine coréenne. Les « counters » sont leurs opposés, des hommes et des femmes qui se mobilisent pour contrer les messages de haine.
Un génial documentaire qui s'intéresse aux "Counters", des contre-manifestants s'opposant aux racistes japonais qui paradent contre les coréens (entre autres) dans un pays où aucune loi ne condamne l'incitation à la haine (raciale). Au delà du sujet, le film est déjà stimulant par son dynamisme et ses nombreuses idées de mises en scène mais surtout pour son approche et ses intervenants. Le cinéaste donne ainsi la parole à tout le monde, y compris au leader d'extrême droite sans que ses propos soient jugées ou que le commentaire et les questions soient condescendantes ou moralisatrices. Et puis il y a Takahashi qui mériterait un film à part entière : un ancien yakuza qui a quitté le milieu révolté par leur injustice, mettant son énergie à défendre les personnes discriminées, tout en gardant ses idées de droite et son tempérament impulsif, voire violent. Ainsi, contrairement aux Counters, qui protestent pacifiquement, lui et ses acolytes cherchent plutôt à en découdre et tabasser leurs opposants. Ce qui lui a fallut quelques séjours en prison. Du coup, le film est passionnant par ses nombreux points de vue et son absence de manichéisme qui questionne notre propre perception du racisme et les moyens de l'affronter. Ca donne aussi une image assez surréaliste de certains japonais (dont je connaissais pourtant la xénophobie) qui atteignent des niveaux de haines incroyables et des paroles décomplexées qui glacent le sang ("ce qu'on a besoin, c'est d'un nouveau Nankin"). La dernière partie est un peu moins réussie en tombant dans une forme plus facile quand les questions se déplacent à un niveau politique national avec un projet de loi en débat. On n'échappe aux violons dégoulinants et des propos plus consensuels tout en reconnaissant qu'il est difficile de ne pas être transporter par l'émotion lors du vote de la loi et les pleurs de joie des concernées.
L'un des 3-4 meilleurs films découverts dans cette édition 2018 FFCP et j'ai vraiment penser à Samuel Fuller dans la complexité du traitement et du regard des intervenants.