AccueilFilm › Tralala - Film (2021)

Tralala - Film (2021)

Tralala - Film (2021)

Tralala - Film (2021)

Tralala, la quarantaine, chanteur dans les rues de Paris, croise un soir une jeune femme qui lui adresse un seul message avant de disparaitre : "Surtout ne soyez pas vous-même". Tralala a t-il rêvé ? Il quitte la capitale et finit par retrouver à Lourdes celle dont il est déjà amoureux. Elle ne se souvient plus de lui. Mais une émouvante sexagénaire croit reconnaître en Tralala son propre fils, Pat, disparu vingt ans avant aux Etats-Unis. Tralala décide d’endosser le "rôle". Il va se découvrir une nouvelle famille et trouver le génie qu’il n’a jamais eu.

Informations du fichier


Seeds : 726
Leechs : 254
telecharger

La comédie musicale est une destination qui tenait de l’évidence pour les frères Larrieu toujours un peu en décalage, adeptes d’une mélodie singulière et en raccord avec la magie narrative qu’elle suppose, ils ne pouvaient que s’y sentir à l’aise. De retour dans leur ville natale de Lourdes, les cinéastes convoquent le fleuron de la chanson nationale pour un film qui sera, au sens noble du terme, français jusqu’aux bout des ongles. Les plus rétifs à l’univers perché de Katerine, voire aux décrochages de Dumont quand il s’essayait lui-même à ce genre dans Jeannette, ne passeront probablement pas le premier quart d’heure, il est vrai particulièrement exigeant. Il semble qu’on souhaite, avant que la magie n’opère, soumettre le spectateur à une exposition brinquebalante, à l’image du squat dans lequel évolue le clochard poète qui n’a pas encore trouvé ni métrique, ni mélodie. Une apparition Gare Montparnasse et un voyage initiatique pourront le conduire vers une série de miracles, le premier étant d’avoir sous les yeux la ville de Lourdes vidée de ses habitants, pandémie oblige. L’intrigue fantasque construit ainsi une supercherie où les masques ne sont pas que chirurgicaux pris pour un autre, le protagoniste (Amalric, parfaitement à l’aise en marginal, on s’en serait douté) devient, à la faveur d’un furieux désir de croire de la communauté où il débarque, un fils, un oncle, un frère, un père et l’amour de jeunesse de femmes bien décidées à revivre. « Surtout, ne soyez pas vous-même », lui avait annoncé la femme en bleu, vierge en training à l’origine de son trip mystico-priapique… Il en sera donc ainsi, en accord avec cette fantasmagorie qu’est la comédie musicale, où les mélodies naissent en pleine rue et la crédibilité n’est pas exigible. Mais pour que le miracle advienne véritablement, il faudra attendre l’irruption de Bertrand Belin, frère blessé d’abord dubitatif quant à l’identité de l’imposteur. La gravité de son personnage et la présence magnétique du chanteur irrigue subitement le film d’une nouvelle profondeur, qui influe directement sur le superbe chant que lui offre Amalric en réponse. À partir de cet instant, les chansons de Daho, Dominique A, Keren Ann ou Jeanne Cherhal se lovent à merveille dans l’écrin euphorisant de cette communauté - et si celles du duo SEIN convainquent beaucoup moins, elles gardent le mérite d’élargir la palette musicale. Le sens de la fête (superbe soirée disco groove dans une boîte de nuit exhumée) laisse un temps se perpétuer la foi sans entrave, et l’hédonisme d’une quadra émancipée de son échoppe, la sublime Mélanie Thierry transfigurée en muse sensuelle et solaire. Mais Tralala avance par sous-couches de l’artifice à l’imposture, des marivaudages à l’amour, des retrouvailles à la rencontre, des conflits aux aveux. La véritable émotion se loge dans la beauté des chorégraphies, l’hypnose croissante des danses collectives et la prise de conscience de la possibilité de perdre l’harmonie retrouvée. Le voile d’effroi dans les yeux de Mélanie Thierry, le visage de Bertrand Belin qui se fige font remonter à la surface les marées noires de la mélancolie, où la lucidité explose à notes feutrées (« Mes rêves ont fait long feu / Je fais mon Clint Eastwood / Un vivant décoratif / Un mort définitif »). Le dénouement sera donc celui d’un départ, et d’une nouvelle acceptation d’un deuil qui sommeillait depuis 20 ans. La fête se poursuit, la nuit tombe, les lumières se reflètent sur la surface d’un lac qui s’offre comme une nouvelle route à emprunter. Belin, toujours lui, aura le mot de la fin, sublime crooner enjoignant le compagnon prodige à « soigner ses adieux », par un chant définitif Seulement le beau geste / Seulement le mot juste. La parenthèse peut se refermer, sous l’égide de cette paradoxale et indispensable facticité de la comédie musicale. Rendre disponible à l’inattendu, s’ouvrir à l’espoir et contempler les brèches. Le temps fulgurant et éphémère d’une chanson, dont la mélodie pourra se fredonner au retour des jours ordinaires. (8.5/10)

Ces fichiers peuvent vous intéresser :